lundi 21 juin 2021

L’union dans l’abstention

 Au vu des 32 à 33 millions d’abstentionnistes, nul ne pourra évoquer la situation en se contentant de railler, comme toujours, le « parti des pêcheurs à la ligne ». Et si, pour une fois, en politique, les « professionnels de la profession », leurs conseils, consultants et conseillers, ainsi que les médias, se posaient la question de manière radicale au lieu de faire entendre leurs traditionnelles antiennes, du genre « nous avons entendu le message des Français » ? Et si, pour une fois, il s’agissait vraiment de tirer les conséquences de ce désaveu, qui, soulignons-le, concerne moins les candidates et les candidats aux régionales ou aux départementales que les états-majors politiques nationaux, parisiens, jacobins, lesquels ont tout fait pour détourner le débat de ses véritables enjeux ?

Car à y bien regarder, s’agissant notamment des plus jeunes d’entre eux, nous avons affaire à une véritable « grève des électeurs », comme l'y appelait en 1888 (!) Octave Mirbeau, dont le propos a conservé toute son actualité (*) : pas question pour le citoyen mécontent de renforcer le vote protestataire, qui depuis longtemps a montré ses limites. Non, le désenchantement est complet et le dégagisme n’est même plus à l’ordre du jour : en quatre ans l’extrême-centre aura réussi cet exploit de réunir deux Français sur trois, comme l’avait jadis souhaité Valéry Giscard d’Estaing ; mais sans doute le promoteur de la « société libérale avancée » n’imaginait-il pas qu’une telle union se réaliserait dans l’abstention. A tout prendre, cette union-là aussi fait peut-être la force.

(*) Voir également l'analyse d'Ulysse Rabatté sur son blog Médiapart (24 juin 2021).


mercredi 9 juin 2021

La gifle

Talleyrand ayant un jour reçu une gifle qui l’avait renversé, le roi, qui demandait de ses nouvelles, fit allusion à ce soufflet : « Sire, c'était un coup de poing, » lui répondit Talleyrand, avec l'esprit de quelqu’un qui pouvait accepter une agression, mais refusait un affront.

 

jeudi 3 juin 2021

La grande illusion

Quelques quarante ans après les débuts d’une décentralisation timide, il n’est nul besoin d’être un grand spécialiste des institutions pour constater, avec le passage au quinquennat présidentiel assorti d’une chambre d’enregistrement, un retour à marche forcée vers le jacobinisme le plus pur, dont le gouvernement par le biais du Conseil de défense et de sécurité nationale donne aujourd’hui le meilleur exemple. On pourrait conclure de ce constat, et après tout pourquoi pas ? que seule compte désormais dans le système politique français l’élection présidentielle, à l’exception peut-être de celle des conseils municipaux, du moins dans les territoires de déréliction et de relégation où la commune reste la seule entité perceptible par les citoyens.

En fait, et le plus grand parti de France, c’est-à-dire celui des abstentionnistes, ne s’y est pas trompé, l’élection du Président de la République, ou plus exactement le second tour de ce scrutin en quoi réside son essence bonapartiste, vieux démon français qui reste encore à exorciser, consiste désormais dans un choix entre d’une part le candidat ou la candidate qui serait le ou la plus acceptable du point de vue des valeurs républicaines aux dires des médias, des commentateurs et des ultracrépidarianistes, d’autre part un candidat ou une candidate faisant office de repoussoir : on est ainsi passé du fameux « bonnet blanc et blanc bonnet » de jadis à un vote plus illusoire encore, où, à l’instar des émissions de téléréalité, tout semble avoir été scénarisé à l’avance.

Du coup, même l’élection présidentielle apparaît sous son vrai jour, une sorte de référendum par défaut, ce qui n’est pas de nature à renforcer la participation au prochain scrutin.

 

   Un correspondant nous écrit : « Dans les organisations quelle que soit leur nature (entreprises privées ou publiques, administrations...