lundi 25 avril 2022

La croisière s'amuse

 La réélection d’Emmanuel Macron à la Présidence de la République française est venue lever le faux suspense aux allures de psychodrame entretenu à grand peine par les médias depuis quinze jours. Mais cette réélection par défaut masque le délabrement du système princidentiel : jamais en effet depuis 1969, l’abstention lors d'un second tour de cette élection n’avait atteint un tel chiffre ; encore en 1969 le PCF, qui représentait alors près d’un électeur sur quatre, avait-il appelé à s'abstenir eu égard au manque d’enjeux du scrutin puisque les deux finalistes, « bonnet blanc et blanc bonnet », comme l’avait résumé Jacques Duclos, appartenaient à la droite et au centre-droit républicains. Depuis, l'abstention n’a cessé de progresser de manière presque linéaire et, au surplus du vote blanc qui faiblit à peine, elle apparait clairement désormais comme une motion de défiance exprimée par 28 % des citoyens.

Or, il est frappant que les femmes et les hommes politiques, sans parler évidemment des journalistes, n’en parlent pas, ou que peu : victimes d’une surdité volontaire, qui leur permet d’ignorer le désespoir et la colère contenus dans ce silence assourdissant. Pour le personnel politique en effet, quel que soit son appartenance, les abstentionnistes ont toujours été et sont encore constitués par une majorité de « pêcheurs à la ligne » : ils ne sont donc rien électoralement. Au reste, les électeurs qui se déplacent pour voter blanc sont à peine mieux considérés : là encore, le cynisme règne puisque, de toutes façons, les bulletins blancs ne comptent pas plus que les nuls, ou les abstentions ; dans ces conditions à quoi sert-il d'aller voter ? Ce mépris généralisé pouvait encore se comprendre il y a quelques décennies : la télévision, la radio, la presse écrite, tout le monde s’ingéniait à taire les chiffres autres que ceux des scores des candidats ; mais aurait-on oublié que nous vivons dans un monde où Internet et les médias sociaux ont bouleversé la donne en termes communicationnels ? Les débats se tiennent désormais majoritairement sur d’autres écrans que ceux du passé et, quoiqu’en disent les professionnels de la profession, ils ne se révèlent pas beaucoup plus affligeants que ceux vus, entendus ou lus dans les médias traditionnels.

La « macronie » dansait hier soir au Champ de Mars pour fêter la victoire de son champion : on dansait aussi sur le Titanic quand le paquebot a heurté l’iceberg fatal…

   Un correspondant nous écrit : « Dans les organisations quelle que soit leur nature (entreprises privées ou publiques, administrations...