vendredi 22 juin 2018

Caractériser la dépense avant de l’engager : un impératif de bon sens


L’installation d’une piscine au fort de Brégançon, après le renouvellement par l’Élysée de sa vaisselle d’apparat et l’utilisation par le Chef de l’État du Falcon présidentiel pour un déplacement de 110 km entre La Roche-sur-Yon et Rochefort (Charente-Maritime),  suscite la polémique ; mais il sera facile d’opposer à ceux qui se déclarent choqués, sinon indignés par ces « affaires » que, – de même que la commande de la vaisselle élyséenne a été faite au profit de la manufacture de Sèvres, qui est un fleuron de notre patrimoine national et que les sommes concernées s’avèrent au demeurant parfaitement proportionnées à la nature des biens acquis –,  de même que, de toute façon, l’avion présidentiel accompagne le Chef de l’État au long de ses déplacements et qu’en conséquence il vaut mieux ne pas le faire voler « à vide » –, la dépense induite par la piscine du fort de Brégançon ne dépassera pas finalement le coût habituel de ce genre d’installation.

C’est vrai… Et en même temps,  ces différents cas de figure permettent de pointer du doigt un biais dans la manière dont on cherche parfois à les justifier.

Certains en effet considèrent les dépenses afférentes 1)  comme venant enrichir le patrimoine national (la vaisselle d’apparat de l’Élysée), 2) ou bien comme engagées d’avance (le Falcon présidentiel), 3) ou encore comme conformes à la réalité des prix du marché correspondant (la piscine de Brégançon). Or, pour toute personne disposant d’un peu de bon sens et qui est responsable d’un budget  public ou privé, aucune dépense ne devrait être envisagée au travers des trois caractéristiques que nous venons d’énumérer : dans le « vrai monde » des « vrais gens », en particulier chez les « gens de rien », toute dépense avant d’être engagée, doit être examinée selon le double critère absolu de son utilité et de son opportunité ; manifestement, ces principes sont depuis longtemps perdus de vue au sein de l’appareil d’État.

lundi 18 juin 2018

D’où parlez-vous, Monsieur le Président ?



Le Café du Commerce, de l’Industrie et de l’Agriculture réunis, comme on l’appelait autrefois, le véritable parlement du peuple, comme l’a répété Balzac après Swift, paraît le lieu adéquat pour permettre au personnel politique de s’informer de la réalité quotidienne des Français : certes, le lyrisme des débats n’y est peut-être pas toujours à la hauteur de celui des discours des membres de la Représentation nationale ; certes, on peut parfois y respirer à l’occasion quelques remugles nauséabonds ; mais le plus souvent prévaut un certain bon sens et des propos comme ceux tenus récemment par le Président de la République – « On met un pognon de dingue dans les minima sociaux et les gens ne s'en sortent pas. Les gens pauvres restent pauvres, ceux qui tombent pauvres restent pauvres » –, ne constituent finalement qu’un constat largement partagé, depuis le citoyen lambda, accoudé au zinc du comptoir, jusqu’aux magistrats enherminés de  la Cour des Comptes.


Alors, où est le problème ?


Faut-il rappeler qu’un propos, quel qu’il soit, ne peut être isolé de celui qui le tient, du moment et de l’endroit où il est tenu, sans même parler de sa diffusion. Le vieux truc rhétorico-gauchiste, « d’où parlez-vous ? », aujourd’hui presque sorti d’usage, n’est sans doute pas aussi usé que voudraient le faire le croire ceux dont les discours se voyaient jadis ainsi interrompus : c’est même le meilleur moyen, dans un monde de la communication, de renvoyer les discoureurs à leurs responsabilités. 

Or, dans le cas du Président de la République, le plus choquant n’est pas tant ce qu’il dit, puisqu’il répète en l’occurrence ce que ses agentes in rebus ont souvent entendus  au Café du Commerce, mais que ces propos soient tenus sous les ors d’un appareil d’État qui pourtant n’a plus les moyens de ses dépenses somptuaires et dans une posture qui ressemble par trop à celle du monarque que la misère de son peuple « dérange », dans les différents sens du terme.

vendredi 15 juin 2018

Relégués et surveillés


 On parle souvent des « quartiers » (difficiles), des « zones de non-droit » ; mais du moins ces « territoires perdus de la République » s’avèrent-ils toujours vivants, souvent bouillonnants, parfois  remuants …

En revanche, les espaces ruraux, désertifiés, abandonnés par les pouvoirs publics, voient la vie locale s’amenuiser, laissant au reliquat de population un sentiment amer de relégation.

Peut-être celui-ci serait-il supportable à quelques-uns s’il s’accompagnait d’une impression de liberté ; mais, ici comme ailleurs, l’implacable machine étatique de la surveillance et du contrôle s’étend et se renforce chaque jour, grâce aux possibilités énormes de l’informatique de réseau et de collecte de données, dont l’extension est présentée comme inéluctable et souhaitable.


Dès lors, on est en droit de se poser la question de savoir pourquoi un tel outil n’a pas été plutôt utilisé pour favoriser la « subsidiarisation » et la déconcentration, conditions d’un aménagement et d’un développement plus harmonieux du territoire de la République.


Oui, pourquoi les pouvoirs publics ont-ils décidé, manifestement à l’aveugle, que la métropolisation et ses cercles concentriques de banlieues constituaient la meilleure organisation du territoire, laquelle voit quotidiennement des millions d’individus se déplacer de la périphérie vers les centres et vice versa afin de se livrer à une activité économique, basée pour l’essentiel sur l’utilisation de l’informatique ? Activité, dont, au demeurant, on peut bien souvent questionner l’utilité, dont la volatilité apparaît très élevée quand on la mesure à l’aune des délocalisations et qui, en tout état de cause, aurait pu sans difficulté être pratiquée à domicile pour un coût économique et écologique bien moindre. De surcroît,  pourquoi ce travail à domicile ne pouvait-il pas s’exercer, en grande partie, ailleurs que dans les zones déjà densément urbanisées et les métropoles ? Et contribuer ainsi, de manière naturelle, à une meilleure répartition de la population sur l’ensemble du territoire de la République, permettant, partout ou presque, non seulement le maintien, mais le développement d’activités humaines et sociales.


   Un correspondant nous écrit : « Dans les organisations quelle que soit leur nature (entreprises privées ou publiques, administrations...